Arts Plastiques

Performance "Repentir" de Joëlle GIRARD et ses élèves Archives nationales Saint-Denis avec Nicolas FRIZE, création musicale "Silencieusement", 12-16 novembre Réservation : 01 48 20 12 50

03 / 11 / 2015 | François Miquet

Événement à retenir :

Au mois de Novembre, Joëlle GIRARD,professeur agrégé au lycée Jean Jaurès de Montreuil, interviendra avec ses élèves dans la création musicale "Silencieusement" de Nicolas Frize.

C’est l’aboutissement pour lui d’une résidence de deux ans aux archives nationales.

La performance s’intitule : "Repentir".

Archives nationales (site de Pierrefitte – métro Saint-Denis Université – ligne 13), les concerts auront lieu du 12 au 16 novembre 2015. Réservation indispensable au 01 48 20 12 50.

Repentir.L’idée retenue ici réside dans la possibilité de voir une archive se faire bafouer par une autre parce qu’elle propose un nouvel éclairage sur un événement, sans pour autant éliminer la précédente. Le dispositif est basé sur une superposition de traces, dont la transparence permet de comprendre l’élaboration d’un processus de construction de l’information et de l’écriture. Le processus met en lumière les différentes étapes de recherche qui sédimentent une œuvre littéraire, qu’elle soit ou non inspirée d’un fait réel.

L’œuvre de Flaubert « Madame Bovary » figure au programme de terminale, en littérature ; l’opportunité était toute trouvée de travailler de façon transversale avec les élèves en option Arts Plastiques. Flaubert s’est inspiré (entre autres) de deux faits divers : l’affaire Delamare et l’affaire Lafarge, mais également de son histoire personnelle. Son écriture est un savant maillage de toutes ces données, mais avant d’arriver à l’écriture définitive il a produit un nombre incalculable de brouillons qui pourraient même être appelés archives de l’écriture. Ce qui est intéressant dans cette œuvre est le fait qu’on possède un accès virtuel aux manuscrits dans les conditions de l’archive conservée à Rouen. Cette façon de travailler à distance sur une archive a donné l’occasion d’emblée, de se questionner sur les avancées technologiques qui annulent le voyage physique et ne proposent pas la rencontre avec l’original, le papier. Cela permet de réfléchir sur la nécessité d’un lieu de conservation et du devoir de conservation.

Le dispositif performatif lui-même, une vaste étendue de vitres de 15 m de long sur 2,20m de haut évoque d’emblée cette substitution de l’écran au papier. L’espace se présente aux spectateurs comme trois écrans géants. Son immensité évoque l’étendue d’un travail de recherche, le geste d’écriture sans relâche que produisent les élèves, l’opiniâtreté et la ténacité dont fait preuve un chercheur pour livrer une information juste.

Durant 15 mn chaque élève couvre 5,20m de vitres en écrivant le fait divers brut tel qu’on a pu le trouver dans les archives. Après avoir effectué un changement de place chaque élève passe par-dessus l’écriture précédente (le fait divers) pour inscrire un extrait de Madame Bovary tiré des brouillons de Flaubert. Enfin, dans un dernier mouvement, chaque élève superpose les transparents réalisés dans l’atelier, brouillons et maquette de la performance commune. Au centre de ce tryptique figure un portrait imaginaire d’Emma Bovary. Il pointe les similitudes entre le processus de construction d’un dessin et d’une œuvre littéraire.

Le dessinateur connaît bien ce phénomène de superposition de traits appelé repentir qui le rapproche de celui de l’auteur. Nous obtenons par cette technique de trois filtres trois niveaux de lecture qui se superposent et s’enchevêtrent. L’écriture apparaît aux spectateurs à l’envers proposant une compréhension non pas lisible mais visible du contenu. Quand on ne se concentre pas sur le sens du texte on peut à loisir en repérer la dimension graphique géographique pour vivre une expérience sensorielle et temporelle. À la fin de la performance chaque élève efface ce travail d’écritures, matérialisant le fait que toute recherche est un éternel recouvrement, un gigantesque palimpseste. Ce nouveau champ permettra le lendemain soir à une nouvelle équipe d’élèves de venir réinscrire son expérience.

Joëlle Girard.

 
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