Arts Plastiques

Réunion Baccalauréat sur les programmes limitatifs des enseignements artistiques en classe terminale pour la session 2016

16 / 02 / 2016 | François Miquet

Réunion Baccalauréat sur les programmes limitatifs des enseignements artistiques en classe terminale pour la session 2016

Présentation de la classe approfondissement en Arts Plastiques par Jean-Louis Fleury (Professeur d’arts plastiques et coordinateur de la CAAP du lycée Pablo Picasso)
Il y a deux classes d’approfondissement en arts plastiques (CAAP), une au lycée Pablo Picasso à Fontenay-sous-bois et une au lycée Gustave Eiffel à Gagny.
Il s’agit d’une classe préparatoire en un an entièrement gratuite. Cette année prépare aux Beaux-arts, aux Arts décoratifs, aux Ecoles supérieures d’art et de design, aux écoles d’illustration, d’arts appliqués, d’animation ou d’architecture. Ces classes sont différentes des MANAA car elles sont plus ouvertes. Les MANAA ont un enseignement plus orienté vers les arts appliqués.
Dans la classe préparatoire du lycée Pablo Picasso, il y a 90 a 100% de réussite. Il y a 24 étudiants dans les deux classes préparatoires de Gagny et de Fontenay-sous-Bois.
Les élèves sont recrutés sur la filière générale ou la filière professionnelle. Des élèves avec option ou sans option peuvent être recrutés. Il y a beaucoup de candidatures. Les candidats envoient un dossier papier composé de cinq travaux. Il y a 430 demandes pour 24 places. La phase d’admissibilité draine 120 élèves à l’oral.
Les portes ouvertes auront lieu le 30 mars de 09h00 à 17h00 au lycée Pablo Picasso.
L’exposition des travaux des élèves de la classe préparatoire du lycée Pablo Picasso aura lieu le 17 mars. Pour plus de renseignements, allez voir sur les sites CAAP de Pablo Picasso (http://caappicasso.free.fr/) ou CAAP de Gagny (http://caap-gagny.com/).
Le travail sur place s’effectue sous la forme d’ateliers ouverts où la bienveillance et la bonne ambiance règnent.
Gilles Devaux, Pierre Juhasz et Emmanuelle Guedon interviennent auprès des élèves sous la forme d’entretien.
Les échanges et la communication sont au cœur de la relation professeur-élève. Trois pistes sont proposées aux élèves. Ils s’emparent d’une proposition et mènent leur projet jusqu’au bout. Il n’y a plus besoin de sujet.
A la fin de leur année de préparation, il y a une équivalence qui leur permet de rentrer à l’université si les élèves ne veulent pas passer les concours.

M. Da Silva, Le monde est leur atelier, question limitative au bac enseignement de spécialité, série L.

A consulter en annexe sur le site arp Créteil.

Pierre Juhasz, Bill Viola, question limitative au bac option facultative toutes séries.

Comment articuler un enseignement des arts plastiques avec des enjeux liés avec l’œuvre de Bill Viola ? Sur le plan technologique, il est plus facile de tendre vers Bill Viola que Duchamp et le Ready Made.
Il y a une cohérence des points des programmes limitatifs. Il y a deux + trois figures d’artistes engagés dans leurs œuvres. Cela marque une certaine cohérence du côté de l’option facultative avec les trois artistes Paolo Caliari, dit Véronèse, Claes Oldenburg et Bill Viola. Ces trois artistes soulèvent la question de la représentation et la question de la ressemblance.
Bill Viola est du côté du registre de l’image plutôt que de la représentation. Dans les 3 cas, la représentation est articulée à une question de présentation. Bill Viola pose la question de la nature des images produites et de la présentation de ces images.
L’œuvre de Bill Viola pose la question de l’expérience même qu’offre l’œuvre dans sa réalité. Le dispositif est essentiel, on rentre dans un rapport phénoménologique avec l’œuvre d’art.
On peut mettre en avant des repères opérationnels dans l’œuvre de Bill Viola.
Dominique Château (esthéticien) apporte l’idée de l’image qui se décline en deux parties. Il y a l’image de quelque chose et l’image là. L’image de quelque chose nous amène vers un ailleurs. L’image là, c’est la question de la matérialité de l’image. Dans la lignée de ce questionnement de la matérialité de l’image, il y a le format de ses images qui prend une place essentielle dans l’œuvre de Bill Viola.

Comment faire pour montrer le foisonnement des œuvres de Bill Viola ?
Bill Viola dit « Je suis né en même temps que la vidéo (en 1951). »
Naim June Paik marque les débuts de l’art vidéo avec ces télévisions déréglées. En 1928, on assiste aux premiers essais télévisuels. En 1948, la télévision française est lancée. L’image électronique télévisuelle se diffuse par les ondes, il s’agit donc d’un signal transmissible. Il y a une forme d’immédiateté de l’image par télétransmission et celle du direct. La dimension sociologique de la télévision qui envahit les foyers dans les années 60 émerge.
Naim June Paik fait un acte de résistance par ses œuvres d’art. La télévision produit des images abstraites générées par le brouillage, le parasitage de l’image. Le message que semble véhiculer Naim June Paik est : « La télévision nous a attaqué, nous contre-attaquons. »
Bill Viola va découvrir la vidéo portative au College of Visual and Performing Arts. Dans l’œuvre de l’artiste, il y a une première période d’apprentissage et d’expérimentation dans la vaine des pionniers de l’art vidéo, Nam June Paik et Bruce Naumann. Ces artistes travaillent sur la nature de l’image elle-même par des opérations de brouillage. Ce qui intéresse Bill Viola, c’est le rapport produit entre le signal sonore et le signal visuel.
Au départ, l’artiste questionne la présence du corps dans le dispositif. Son travail relève alors plus de la performance que de la vidéo. La vidéo est là pour garder trace de l’œuvre. La priorité est donnée à l’expérience sensible, sensorielle. Dans l’œuvre de Bill Viola, on a toujours le corps mis dans une situation de tension « à la limite de ». La question de l’expérience dans l’image là, avec le type de dispositif que met en place Bill Viola, est posée.
Dans l’oeuvre Il pleure pour vous, 1976, (http://wikieducator.org/He_Weeps_for_You) Bill Viola, la vidéo produite par l’artiste est analogique. Dans cette œuvre, on peut y voir un tuyau, duquel goute une goutte d’eau toutes les 2 secondes, sur lequel est fixé une caméra. Cette caméra filme en très gros plan la goutte tombant sur un tambour dans la salle et dont le son est amplifié dans cette même salle. Lorsque le spectateur s’approche pour voir la goutte, son image se reflète dans celle-ci qui est elle-même projetée. Il y a à la fois un dispositif réel qui se produit, une mise en tension entre l’image et son artifice et à la fois une expérience de l’ici et du maintenant. Il s’agit d’un dispositif réflexif qui génère une mise en abîme. Cette idée d’image en reflet est une référence que Bill Viola emprunte à Platon.
The Reflecting Pool, 1977, (https://www.youtube.com/watch?v=GHdX7sApIMc) est une œuvre qui concentre beaucoup d’enjeux. Bill Viola lui-même en est le personnage principal. L’artiste est donc présent dans l’œuvre et de ce fait active une expérience de son propre corps.
Jean Paul Fargier dans The Reflecting Pool de Bill Viola, 2006, considère Reflecting Pool comme le début de l’art vidéo. Il ne s’agit plus d’un art de résistance mais d’une œuvre construite.
Dans cette œuvre, l’eau est une surface réfléchissante. Bill Viola crée un système d’infiltration. Au bout de quelques minutes de vidéo l’image du dessus est gelée. L’artiste joue avec différentes temporalités grâce à l’usage de fondus enchaînés :
  Un temps analogique qui est celui d’un temps vécu ressemblant.
  Un temps de l’image et du simulacre.
C’est l’artifice technologique qui permet de faire émerger ces images. Tout ce qui est inauguré dans l’art vidéo est déjà présent dans l’œuvre de Méliès (l’idée de trucages). Une œuvre vidéographique qui joue un passage important dans l’art, cela reste une vidéo à part entière qui ne nécessite pas de dispositif de présentation particulier.

La deuxième caractéristique dans l’œuvre de Bill Viola, c’est son investigation des dispositifs de présentation à travers le format des écrans. En 1990, on voit la naissance de l’écran Plasma et du perfectionnement de la vidéo projection. A cette époque-là, l’image filmée à 300 images par seconde peut être retranscrite avec un ralenti.
The Greeting, 1995, (http://collection.whitney.org/artist/4421/BillViola) Bill Viola fait la citation d’un tableau de la Renaissance. Il commence à travailler en studio. Il s’agit là d’une œuvre charnière qui fait référence à la peinture ancienne. Il y a d’autres paradigmes dans son travail, la question du tableau et la volonté de mettre en espace l’œuvre vidéographique (expérience immersive). Dans son œuvre, la référence au tableau est très prégnante. Les plans deviennent fixes, ce sont des micro-évènements avec des temporalités courtes et en définitive complètement dilatées. Bill Viola n’ignore pas la phrase d’Alberti qui dit du tableau qu’il s’agit d’« une fenêtre ouverte sur l’histoire ». Cette phrase marquera la naissance du tableau.
Dans le Laocoon, 1766, Lessing effectue le partage des arts, ainsi pour lui la particularité des arts plastiques est de l’ordre des arts de l’espace et la particularité de la poésie est de l’ordre des arts du temps.
La particularité d’une peinture synthétique est de raconter une histoire. Il appelle cela l’instant fécond, l’instant prégnant. Il s’agit d’une condensation temporelle de la narration. Bill Viola crée des micro-évènements qui font tableaux, ce sont des instants féconds.

Les grandes thématiques qui traversent l’œuvre sont existentielles. Bill Viola est un grand mystique. Il est passé par l’Inde, le Japon. Il s’intéresse aux diverses croyances. L’artiste joue la dimension mystique au travers de la technologie en mêlant expérience intime et présence spirituelle dans ce monde. En cela, il joue de la technologie que permet la vidéo.
Dans ces œuvres, il met en scène le passage d’un corps informe au travers d’un rideau d’eau. L’eau a une matérialité horizontale, dans ce type d’œuvre le rideau d’eau devient vertical. Il s’agit d’une limite, d’un passage, d’une naissance, le corps va traverser l’écran.
The return, 1997, 7 min (https://www.youtube.com/watch?v=ZwV-ifaoydU), dans cette œuvre, la question du son est importante. Le son de l’eau sur le corps est amplifié. Bill Viola met en scène la dimension symbolique du passage comme un acte de naissance. Cette œuvre nous parle aussi de l’image car un écran d’eau est aussi un écran. C’est ce rideau d’eau qui grise l’image, quand le personnage repasse de l’autre côté du rideau elle revient à la couleur. L’artiste exploite le tableau en utilisant des moyens réflexifs propre à la vidéo. Il y a une très grande modernité intrinsèquement liée à la modernité technologique. Greenberg parlait d’une modernité par rapport à la spécificité des matériaux convoqués dans une œuvre d’art.
« C’est dans sa forme pure qu’un art frappe fort. » Robert Bresson
Bill Viola exploite la spécificité des images. L’image analogique n’a pas la même spécificité que l’image numérique. L’artiste n’est pas dans une orientation minimaliste, il pense ce qui constitue l’être (Eros, Thanatos, la vie, la mort, le passage).

Sur le site Canopé de nombreuses brochures sont en consultation avec des liens sur Bill Viola (https://www.reseau-canope.fr/notice/bill-viola-synthese-multimedia.html).
Il y a également des contenus en lien avec Bill Viola sur You tube (https://www.youtube.com/results?search_query=bill+viola), le site de la RMN (http://www.grandpalais.fr/fr/article/bill-viola-lexposition) et le site du Grand Palais.

Les élèves dans tout cela ?
Il faut aborder du côté de la pratique ces enjeux. Il y a différents enjeux qui ont été soulevés précédemment : le rapport à l’expédient, l’expérience intime ou autobiographique, la présence du corps. Il faut parvenir à donner à voir une expérience sensible, donner à voir le temps ou dilater le temps. Avec des moyens technologiques simples, on peut aborder la notion de temps avec les élèves.
La question de la temporalité est prégnante également chez d’autres artistes :
  Douglas Gordon, 1993, 24 heures psycho (https://www.youtube.com/watch?v=UtLg5TqqVeA), projection 2 images secondes, Il joue sur la dilatation du temps.
  La jetée de Chris Marker, 1962, (https://vimeo.com/46620661) est un film composé exclusivement de photographies, il n’y a aucune image en mouvement. Alain Fleischer dans Fenêtre sur cour, 2000, filme et recadre le film d’Hitchcock du même nom. Que reste-il après l’opération de recadrage ? Alain Fleischer nous fait réfléchir sur ces notions d’espace, d’expérience par le jeu d’écrans sensibles. Il questionne l’image de seuil comme lieu d’un basculement entre deux espaces contigüs.
D’autres questionnements émergent comme ceux du corps comme lieu d’un esprit. Comment donner par l’image (une extériorité) une intériorité (l’art du portrait) ? Il peut être initié une réflexion autour du paradigme du tableau et de la citation. Bill Viola dit qu’il utilise la vidéo pour vivre de l’intérieur l’œuvre.
Christian Marclay, 24 heures, 2010, (http://www.centrepompidou-metz.fr/clock-christian-marclay) cette œuvre est un montage d’extraits de films. Dans chaque extrait, il y a toujours une indication de l’heure, une indication temporelle. Le film dure 24 heures. Il est synchronisé au réel. Il y a cette idée de refaire surgir un ici et maintenant de l’expérience en mettant de côté la transmission.
« Donner le temps de voir ce qui constitue l’image autant que ce qu’elle représente. » Bill Viola
« Le mot image est un anagramme de magie. » Gérard Titus Carmel
La question du sublime est présente dans l’œuvre de Didier Anzieu, Le corps de l’œuvre, 1981, Gallimard.
Il y a un distingo entre image (vidéo) et représentation (peinture) du point de vue de sa matérialité. A toute reproduction, il manque son ici et maintenant. La présentation met en présence. Gérard Duchêne opère cette réflexion en nous parlant d’image d’image qui devient objet pictural.

 
Directeur de publication :
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Secrétaire de rédaction :
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